Pendant l’entre deux guerres, l’abbé DEROGY, comme beaucoup de ses paroissiens, avait une grande dévotion à la Vierge Marie et à Sainte Bernadette de Lourdes. C’était aussi un grand recruteur de pèlerins pour le voyage annuel en train au sein de « l’Hospitalité Picarde » en partance pour Lourdes. Un bon nombre de miracles, de guérisons ont lieu dans cette petite ville des Pyrénées au cours des pèlerinages.
Un an et demi après être arrivé dans sa paroisse, l’abbé DEROGY, installe dans l’église et fait bénir la statue de Sainte Bernadette en avril 1934. En novembre de cette même année, c’est la salle paroissiale qui prend le nom de « Salle Notre Dame » avec bénédiction de la statue de la Vierge, logée dans la croix du haut du pignon (la niche et la croix sont encore visibles).
La Seconde Guerre Mondiale éclate. Le village est encore sous l’émotion de ses disparus de la guerre 1914-1918… L’abbé DEROGY fait le vœu d’édifier une grotte, réplique de celle de Lourdes, si le conflit exempt les conscrits et les prisonniers du village. Les habitants le suivent dans ce projet…
Lors de ses nombreux pèlerinages à Lourdes, l’abbé DEROGY avait fait connaissance avec un brancardier d’Amiens : Maurice DUDAY, architecte.
Il le contacte pour faire les plans ainsi qu’une maquette de l’édifice.
Le jeune enfant dans les bras de son père est Paul-Marie DUDAY.
Le 9 janvier 1944, la demande par courrier de réaliser la grotte est acceptée par le Conseil Municipal présidé par Emile HURDEQUINT.
La délibération est envoyée au Préfet de la Somme, ce dernier demande qu’un document précisant la donation de la construction par l’abbé DEROGY à la Commune soit établi soumis aux formalités d’enregistrements…Il n’y a pas trace de ce document officiel (notarié) en mairie ou aux archives départementales.
Le lieu retenu est du coté droit de l’église, entre la sacristie et le jardin du presbytère sur une partie de l’ancien cimetière, terrain communal.
Les matériaux naturels : les grès remontant régulièrement des terres labourées, heurtés par les socs de charrues.
La bénédiction de la première pierre a lieu au printemps 1944.
L’édification est en cours durant l’été ; des convois de chariots attelés de plusieurs chevaux, chargés de sacs de ciment (pris chez G. GAILLIEGUE sur les quais de la Somme) en revenant sur la route Amiens-Hérissart, sont survolés en rase motte par les avions anglais. Par crainte de mitraillages aériens, ces convois sont abandonnés un instant par les conducteurs partis se mettre à l’abri…
C’est Régis TURMINE, maçon du village qui construit l’édifice, aidé de jeunes bénévoles.
Un volume impressionnant de grès est nécessaire : 900 tonnes.
Chacun, au propre comme au figuré « amène sa pierre à l’édifice ». Aujourd’hui encore des habitants peuvent reconnaître les grès qu’ils ont amenés.
Lors des bombardements de mai 1940, une bombe tombée dans une des pâtures d’Hector DHEILLY avait creusé un cratère faisant découvrir un énorme grès…Belle aubaine !!!
Il a trouvé sa place dans l’édifice. C’est probablement le plus volumineux, chargé de symbole !
Le dimanche 9 septembre 1945, est organisé la fête du retour des prisonniers de la commune.
La messe a lieu en plein air devant la grotte…
Les prisonniers de guerre allemands, travaillant pour la commune et ensuite dans des fermes du village, avant de quitter Hérissart, se feront photographier devant la grotte, devenu symbole de réconciliation et de paix.
Les travaux de son édification, à une époque de pénurie, auront donc durée au maximum 1 an et demi.
La bénédiction de la statue de la grotte à lieu le 29 août 1948. C’est le chanoine DUHAMEL qui officie la cérémonie devant un millier de pèlerins. Une belle statue de la Vierge réalisée par le Maître statuaire DARRAS prend place dans la niche. C’est un grand jour pour l’abbé DEROGY et ses paroissiens.
Ce jour là, les personnalités avant la cérémonie religieuse vont s’incliner à la mairie devant l’effigie du général LECLERC, inaugurée le 14 juillet.
Au monument aux morts, la fanfare joue « la Marseillaise » avec une pensée particulière pour Jules MANSART, tué récemment en Indochine le 13 juin.
Le 7 Juin 1953 grand rassemblement des hospitaliers avec les brancardiers et infirmiers devant la grotte d’Hérissart.
Le 7 mars 1954, « l’Hospitalité Picarde » remet à l’abbé DEROGY la médaille d’or des pèlerinages. Monseigneur STOURM évêque d’Amiens, fait également le déplacement pour cette visite privée.
En 1955, malade, il se retire dans le village, où il décède le 19 janvier 1959. Sa sépulture est au milieu de ses paroissiens, dans le cimetière d’Hérissart, le village auquel il a consacré une grande partie de sa vie et où il a su compter sur un bon nombre d’amis. L’épitaphe est la suivante : A son dévoué pasteur Mr. l’abbé DEROGY Curé de 1932 à 1954 La paroisse d’Hérissart reconnaissante Vers l’avenir fraternel Et tout droit
L’abbé DEROGY fut le premier à lancer la J.A.C. dans le diocèse en 1936 ce qui l’obligea à circuler beaucoup dans le département. Il fut un fervent des pèlerinages de Lourdes, bien connu des pèlerins, ce prêtre laissera le souvenir d’un homme actif, dévoué, aimé et d’une grande piété mariale.
Jusque dans les années 1970, à l’issue des célébrations du sacrement du mariage et communions solennelles, un ou deux cantiques à la Vierge, étaient chantés devant la grotte.
Ensuite, les photos souvenir était faites pour rejoindre les albums de famille…
Enquête historique, documentations, rédaction : Dany Dheilly, historien
Iconographies : Abbé Derogy - Henri Mansart (1 image de la Célébration des communiants devant la grotte - 2 images de la Foule)
Cartes postales des Editions (?)